« Trois piliers, et le plus tôt possible »
La prévoyance professionnelle est sujette à des discussions politiques récurrentes. Entre les réformes de l’AVS et le refus, en 2024, d’adapter la loi sur le deuxième pilier, les jeunes ont parfois des doutes quant à leur droit à une rente de retraite dans quarante ans. En plus d’organiser régulièrement des formations sur ce thème, Angestellte Schweiz a rencontré une experte du domaine, qui insiste sur l'importance d'une information de qualité et d'une attention précoce pour entrevoir l'avenir sereinement.
Vous donnez régulièrement des cours sur la prévoyance professionnelle dans les entreprises. Les gens sont-ils en général suffisamment informés ?
Lorsque nous donnons des conférences aux collaborateur·rice·s, nous sommes toujours surpris de constater que les connaissances des assuré∙e∙s en matière de prévoyance professionnelle sont plutôt limitées, qu'il s'agisse des prestations assurées ou des possibilités offertes dans le cadre du 2e pilier, comme les rachats. Cela est surprenant dans la mesure où, pour la plupart des personnes, le capital accumulé dans le deuxième pilier représente la plus grande partie de leur avoir de vieillesse. Souvent, les assurés surestiment les prestations qu'ils recevront à la retraite.
« Il est recommandé de commencer à réfléchir aux revenus après la retraite dès l'âge de 45-50 ans ; à 60 ans, les jalons sont posés. »
Quelles sont les questions les plus fréquentes qui sont posées lorsque vous donnez un cours sur la prévoyance ?
Le montant de la pension de retraite est une question récurrente. Les paramètres du taux de conversion, du taux d'intérêt et des bonifications de vieillesse y sont liés. Les questions relatives au retrait d'un capital, par exemple pour acheter une maison ou se mettre à son compte, ou au partage des avoirs en cas de divorce se posent de plus en plus souvent. La mobilité internationale se manifeste également dans la prévoyance professionnelle avec des questions telles que l'assujettissement à la sécurité sociale ou les possibilités de retrait du 2e pilier en cas de départ à l'étranger.
Les personnes qui ont travaillé temporairement en Suisse ont souvent des lacunes de cotisation qu'elles peuvent combler au moyen de rachats. Si des avoirs de vieillesse ont été « perdus », la Centrale suisse du deuxième pilier peut être contactée. Cette institution basée à Berne s'occupe de retrouver les avoirs en déshérence. Il n'y a pas de limite de temps pour faire une demande. Finalement, une autre question centrale concerne les certificats de prévoyance : comment lire et comprendre les nombreux chiffres ?
Peut-on donc dire que les certificats de prévoyance sont trop compliqués ?
Les certificats de prévoyance sont structurés en informations générales telles que l'entrée dans l'entreprise, la date de naissance, l'état civil et le salaire. Il vaut la peine de vérifier ces informations. Les autres points centraux du certificat de prévoyance sont l'avoir de vieillesse disponible, les prestations de vieillesse projetées à l'âge terme, les prestations de risque ainsi que leur financement.
Il convient de noter que les prestations de vieillesse sont calculées au moyen d'un taux d'intérêt dit de « projection » à l'âge légal de la retraite. Ce taux est un taux attendu à long terme par l'institution de prévoyance, mais non garanti. Les valeurs projetées doivent donc être prises avec une certaine prudence.
Comment résumer simplement les notions de taux de conversion et de taux de coordination ?
Chaque année, l'employeur et les salarié∙e∙s versent à la prévoyance un pourcentage du salaire assuré, comme défini dans le plan de prévoyance. Ces « bonifications de vieillesse annuelles » sont rémunérées. À l'âge terme, un capital est disponible. Le capital vieillesse est converti en une rente de vieillesse à vie à l'aide du taux de conversion. Ainsi, un taux de conversion de 6% signifie qu'un capital vieillesse de 100.000 CHF donne droit à une rente de vieillesse à vie de 6.000 CHF par an.
Conformément à la loi LPP, le taux de coordination est déduit du salaire déclaré, car certaines parties du salaire sont déjà assurées dans le 1er pilier. Les bonifications de vieillesse annuelles sont déterminées à partir du salaire assuré ainsi calculé.
La déduction de coordination ne doit pas obligatoirement être prévue dans le plan de prévoyance. Il est possible d'assurer de meilleures prestations que celles prévues par la loi.
La prévoyance professionnelle fait l'objet de nombreux débats politiques, mais les révisions réussies jusqu'à présent ne concernent que l'AVS. Quelle est votre opinion sur ce sujet ?
Chez Howden, nous sommes partisans d'un principe fort des trois piliers.
L'AVS est une assurance sociale publique dont les prestations/cotisations sont fixées de manière uniforme pour tous les assuré∙e∙s. Comme les cotisations sont calculées sur le salaire non plafonné, mais que les prestations sont plafonnées, les redistributions sont inhérentes. La réforme AVS21 modernise le 1er pilier et introduit désormais un âge de référence unique pour les hommes et les femmes ainsi qu'une plus grande flexibilité dans le versement des rentes. Lors de la dernière votation, une 13e rente AVS a été acceptée par le peuple, et une prochaine adaptation est nécessaire pour assurer l'égalité en matière de rente de veuve et de veuf. Le financement de ces deux derniers points n'est toutefois pas encore définitivement fixé.
En ce qui concerne la prévoyance professionnelle, chaque employeur a l'obligation de définir avec ses employé∙e∙s une caisse de pension et un plan de prévoyance. La loi LPP, qui prévoit des prestations minimales, sert de base. Ces prestations de risque/d'épargne peuvent toutefois être améliorées dans le plan de prévoyance. Cela augmente l'attractivité d'un employeur. La réforme de la LPP devait renforcer le 2e pilier, étant donné que l'espérance de vie augmente et que les revenus d'intérêts diminuent. La réforme prévoyait différents ajustements. L'un des aspects était le taux de conversion de 6,8%, trop élevé pour l'espérance de vie actuelle. D'autres points étaient un échelonnement simplifié des bonifications de vieillesse, une adaptation de la déduction de coordination et une amélioration pour les employé∙e∙s à temps partiel et les personnes à faible revenu. Le projet était toutefois très complexe et a été rejeté par le souverain.
La réforme de la LPP concernait la partie légale selon la LPP, c'est-à-dire les salaires compris entre CHF 22'680 et CHF 90'720 (2025). Dans la partie surobligatoire, les prestataires sont libres de définir les conditions. En conséquence, les prestataires exigent davantage d'épargne surobligatoire et peuvent ainsi compenser les prestations trop élevées de la prévoyance obligatoire.
Si vous deviez résumer les bonnes pratiques en matière de prévoyance en trois conseils, quels seraient-ils ?
- Informez-vous à temps et en détail.
Malheureusement, l'intérêt pour la retraite ne se manifeste souvent que relativement près de la retraite. Pour les jeunes assuré∙e∙s, le thème de la prévoyance vieillesse n'est généralement pas une priorité, car la vieillesse est encore trop loin. L'inflation, la baisse du taux de conversion et le travail à temps partiel avec des salaires assurés plus bas ont un impact sur la future pension de retraite. Une retraite anticipée doit également être mûrement réfléchie, car dans le 1er pilier, l'obligation de cotiser s'applique jusqu'à l'âge terme et les rentes du 1er et du 2e pilier sont réduites à vie en cas de retrait anticipé.
Howden est convaincu qu'il est important d'informer régulièrement les collaborateurs sur les 3 piliers et de les sensibiliser aux possibilités d'épargne supplémentaires dans les 2e et 3e piliers. Un courtier peut aider les entreprises de manière ciblée en proposant des orientations aux employé∙e∙s.
- Se faire conseiller par un organisme neutre, éventuellement demander un deuxième avis.
Les assurances sociales sont très complexes et les décisions ont toujours des conséquences à long terme. Un exemple est la décision prise à l'âge de la retraite concernant le versement d'un capital ou d'une rente. Cette décision est très individuelle et doit être évaluée en fonction de différents facteurs tels que la situation familiale, d'autres sources de revenus, l'espérance de vie.
Il vaut la peine de se faire conseiller par un organisme neutre tel qu'un courtier et de se faire présenter les différentes options avec leurs avantages et inconvénients.
- Épargner tôt dans les trois piliers
Les trois piliers sont pertinents pour obtenir un revenu suffisant à la retraite. Même s'il n'est pas toujours possible de verser le montant maximal de 7 258 CHF par an dans la prévoyance privée, le 3e pilier, un pilier supplémentaire assure un meilleur équilibre. Nous recommandons donc d'alimenter les trois piliers.
En savoir plus sur Howden
Howden est un groupe d'assurance mondial de premier plan, centré sur l'actionnariat salarié. Fondé en 1994, le groupe offre des services et des solutions de courtage en assurance, de courtage en réassurance et de souscription à des clients allant des particuliers aux plus grandes multinationales.
Le groupe opère dans 55 pays d'Europe, d'Afrique, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Amérique latine, des Etats-Unis, d'Australie et de Nouvelle-Zélande, emploie 19'000 collaborateurs et traite 42 milliards de dollars de primes pour le compte de ses clients.
En Suisse et dans la Principauté de Liechtenstein, l'entreprise est présente et active depuis 2021 sur treize sites et emploie plus de 200 personnes.
Pour plus d'informations, consultez https://www.howdengroup.com/ch-fr
Helena Sievi est diplômée en économie de l’Université de Zürich et dispose d’une longue expérience dans le domaine des assurances, en Suisse et à l’internationale. Elle a été responsable de mandats LPP et depuis novembre 2023, dirige le département « Prévoyance professionnelle » sur le site zurichois d’Howden.
Auteur-e
Laure Fasel
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ArticleNotre association s’engage pour l’optimisation de votre prévoyance professionnelle : une formation dédiée à cette question aura lieu l’an prochain. En attendant, voici quelques conseils pour garder le cap dans la tempête.